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vendredi 11 octobre 2013

Banksy fait des rues de New York son nouveau terrain de jeu


Pochoir de Banksy réalisé le 1er octobre 2013 au 18 Allen Street, à Chinatown, au sud de Manhattan.

C'est un jeu de piste, dans lequel la ville devient musée. Pendant tout le mois d'octobre, Banksy fait de New York à la fois son atelier et sa galerie d'exposition. Chaque jour, le plus célèbre des street-artists peint un pochoir à l'abri des regards, avant que les New-Yorkais ne le découvrent au détour d'un mur, d'un rideau de fer ou d'un vieux camion déjà tagué. Effervescence assurée.

Cette performance itinérante s'intitule "Better Out Than In" (mieux vaut dehors que dedans). L'artiste britannique, dont on ne connaît toujours pas la véritable identité, rappelle ainsi à ceux qui s'arrachent ses œuvres pour des centaines de milliers de dollars, que son travail appartient à la rue et son caractère éphémère en est une partie intrinsèque. Et Banksy de citer Paul Cézanne : "Toutes les peintures peintes à l'intérieur, dans l'atelier, ne seront jamais aussi bonnes que celles faites à l'extérieur."

Pochoir de Banksy réalisé le 3 octobre 2013 à Midtown (New York).

Le premier de ses pochoirs new-yorkais, révélé mardi 1er octobre au n°18 d'Allen Street, dans Chinatown, n'a survécu que quelques heures. Il représentait deux gamins se faisant la courte échelle pour attraper une bombe de peinture dessinée dans un vrai panneau d'interdiction avec la mention "Graffiti is a crime". La pancarte a été descellée et le graffiti de Banksy, barbouillé de blanc. Tant pis pour ceux qui n'ont pas été assez rapides. Mais une séance de rattrapage est organisée chaque jour. A chacun de trouver l'endroit avant que l'œuvre ne se métamorphose. C'est ce qui est arrivé à sa troisième intervention : un chien levant la patte sur une borne à incendie, qui lui murmure "Tu me complètes", sur un mur de Midtown, s'est retrouvé, peu de temps après, muni d'une laisse dessinée par un passant.
Comme dans un musée classique, Banksy met à disposition du visiteur un audio guide. Pour l'écouter, il suffit de composer un numéro gratuit, inscrit au bas de l'œuvre, le 1-800-656-4271, auquel on ajoute # et la date de la révélation. Pour le chien, une voix doucereuse, un léger cheveu sur la langue, vous susurre sur de l'easy listening : "Etes-vous en train de regarder l'un des plus grands chefs-d'œuvre du XXIe siècle ? Si c'est le cas, vous êtes au mauvais endroit, vous devriez être en train de regarder un chien au pochoir urinant sur une borne à incendie."

Tag réalisé par Banksy le 2 octobre 2013 à Westside (New York).

Systématique, la dérision s'adresse peut-être aux mercantis de toutes sortes, qui tentent de faire commerce de ses œuvres. Plusieurs d'entre elles ont été découpées au Royaume-Uni pour être ensuite vendues à prix d'or aux Etats-Unis. Aussi, lorsqu'il dessine sur un rideau d'acier "C'est mon accent new-yorkais" enpolice caractéristique des tagueurs, avant d'ajouter "normalement j'écris comme ça" d'une écriture sage et rangée, la tentation est grande d'y voir un pied de nez aux galeristes du Lower East Side ou de Down Town.
Quand elle ne s'efface pas, l'œuvre peut devenir mobile, comme dans ce vieux camion General Motors "de quatre cylindres, datant de 1992" (sic), déjà tagué sur les flancs, dans lequel Banksy a composé une sorte de jardin d'Eden, avec pont japonais, arc-en-ciel et fleurs artificielles, tandis qu'en fond sonore du commentaire audio, le bruit d'une cascade se mêle à une musique hawaïenne.

Tag de Banksy réalisé le 5 octobre 2013 sur un camion de livraison new-yorkais.

Pour ceux qui n'ont pas la chance de tomber sur le véhicule, il ne reste plus qu'àaller sur le site de Banksy, où ils pourront retrouver tous les pochoirs précédents, celui du jour, ainsi que les commentaires. Mais avec cet artiste-là, il ne faut jamais s'habituer à la facilité : dimanche 6 octobre, pour la première fois, il n'y a pas eu d'image du jour, juste une vidéo satirique postée sur YouTube, dans laquelle deux rebelles afghans tirent au bazooka sur Dumbo l'éléphant volant. Au moment où l'on croyait commencer à saisir Banksy, le voilà qui nous file à nouveau entre les doigts.